Jean-Sébastien Calmels

 La pluie, le vent, la chaleur excessive du soleil, rien ne faisait obstacel à la présence dehors, à l’exté-
rieur de ce jeune homme silencieux, captif d’une scène invisible.
Je l’invitais à rompre cet isolement. Il accepta.

Il me confia un premier « dessin ». Des panneaux. D’abord isolés, puis entreposés, posés les uns près
des autres, un par un. De face, de profil, de dos, aux détails vertigineux. Puis ils apparurent dans une
scènographie où des routes, des autoroutes, des glissières de sécurité, des voitures venaient prendre
place. Quelques toitures, quelques maisons apparaissaient.

Aux prises avec une exigence et aussi une détermination sans faille, nulle place lors de ses écritures
et tracés pour quelque perturbation, tremblements de la table de travail y compris.
L’ouvrage terminé, l’auteur de l’ouvrage me confiait les noms des éléments représentés, avec concen-
tration, discrétion, joie aussi. Puis, il me confiait son ouvrage, un par jour, demandant parfois à les
revoir – avec jubilation et satisfactions mêlées.
Un panneau apparut, rouillé. Le doigt sur le point de rouille, il dit son angoisse. Penché à ne fenêtre de
l’ancien château où il logeait, il pointait avec angoisse quelque jeune gens présent dehors sous la pluie,
dans le vent, et confiait : « Il faut qu’il rentre ! Il va rouiller ! ».
Sa rencontre avec un au nom rouillé transforma cette angoisse. Aux panneaux rouillés se substitua
dans chaque desisn un univers de panneaux riche de détails et de mise en scène.Toujours quelque arbre
nous disait, quand je l’interrrogeais, dans quelle saison nous évoluions.

Sa place avec nous s’est transformée. Une présence plus lumineuse, moins chargée d’angoisse. Ce
travail quotidien, un temps de la journée, s’est poursuivi jusqu’à son accueil en foyer pour adultes.
Toujours il me confiait sa création : « Pour l’exposition, tiens, Chrisssstin ». Il joignait alors ses deux
mains qu’il séparait dans un intense effort de décollage. J’acceptais d’être dépositaire. Puis, il a pu
aller accrocher quelques unes de ses oeuvres exposées; il s’en est réjoui. Encore ce jour, il manifeste
sa joie lorsque je lui propose l’aventure d’une exposition de quelques unes de ses oeuvres.
Christine Cartéron